GARAGISME MAGAZINE – TUNING IS NOT A CRIME + INTERVIEW MATHIEU MERCIER – Car Problems : Chaine de Démontage – Garagisme MAGAZINE

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Car Problems : Chaine de Démontage
Garagisme MAGAZINE numero 3

 

INTERVIEW MATHIEU MERCIER

CAR PROBLEM

Chaine de démontage automobile

La Collection Daimler, Les résidences BMW du musée Nicéphore Niépce et les Art Cars de Warhol, la chaise interactive R18 Audi Ultra de Clemens Weissharr et Reed Kram, le mobilier sellier de Mercedes, sont autant d’initiatives engagées par les marques automobiles outre-rhin autour de la création contemporaine. L’artiste Mathieu Mercier, jury aux Audi Awards lors de la dernière édition de la FIAC, pose les jalons d’un cadre de collaborations décomplexées entre le monde de l’art et ces nouveaux producteurs.

RT : Jury aux Audi Awards, tu as été au cœur d’une grande opération de communication de cette marque autour de la création contemporaine. Qu‘est ce qui fait qu’un artiste participe ou pas à un tel projet ?

MM : J’ai fais partie de ce jury Audi Awards avec un réel plaisir car nous avions eu accès à l’ensemble des dossiers, aussi bien les projets qui nécessitaient de beaucoup d’argent que ceux qui présentait une idée. La question que je me suis posé en tant que jury a été de savoir si un projet nécessitait réellement des moyens si importants ou si Audi souhaitait communiquer pour soutenir les jeunes talents autour d’un artiste reconnu. Cela m’amusait de faire partie d’un jury qui accordait un prix dont la somme était bien supérieure à tout ce que j’ai pu avoir moi-même comme budget d’exposition. Je pense que beaucoup de jeunes artistes n’ont pas osé déposer un dossier parce qu’ils ne se sentaient pas concernés par les moyens mis à disposition.

RT: Comment envisager une commande ou une collaboration avec une marque quand on considère très souvent insolubles les projets communicants dans le marché de l’art ?

J’ai travaillé avec quelques marques. J’ai réalisé une Absolut Mercier pour Absolut Vodka il y à 10 ans, répondu à une commande de Montblanc, réalisé un édition pour les Galeries Lafayette, travaillé pour Hermès au Japon, signé une Swatch ainsi qu’une bouteille Ricard et je travaille actuellement sur un projet avec Orange. Pour moi il n’a pas de formes ni d’application ridicules. Je peux travailler sur n’importe quelle forme ou objet du moment que j’en comprenne le contexte. Ces collaborations sont la possibilité d’appliquer des logiques de l’art sur des contraintes de produits grand public qui sont un formidable terrain social. Evidemment, les contraintes du marketing et de la production font que les choses sont plus ou moins réalisables. En ce qui concerne le projet de la montre, j’avais énormément d’idées sur le temps qui n’avaient pas pu aboutir sur une œuvre et dont l’application industrielle était presque immédiate.

Le marché de l’art ne concerne que très peu de gens. Il est devenu important parce que les médias prennent le relais des chiffres et du spectaculaire. Ce qui fait parler de l’art aujourd’hui c’est qu’il faille lutter pour rentrer à l’exposition Dali ou qu’il y ait eu un tableau tagué au Nouveau Louvre. Les marques veulent s’approprier cet espace. L’art est aussi perçu comme indispensable dans ce désir total d’un accès à une vie parfaite. Le fait que les entreprises aient aujourd’hui plus d’argent que les institutions est seulement une donnée du sujet. Il ne s’agit pas de faire de l’art mais de l’opportunité d’appliquer ses processus artistiques à un projet grand public qui en est dénudé. Reste à être vigilant pour que cela ne devienne pas l’unique mode de production et un obstacle aux expositions que l’on a envie de voir.

RT : Je te croise toujours à vélo à Paris. Quel est ton rapport à l’automobile ? Un outil de mobilité où un contexte de création ?

Ma relation avec les voitures est délicate. Je n’ai pas le permis. J’ai vécu à Paris, à Berlin et à New York où je n’ai jamais eu besoin de conduire. Le véhicule prend tout le corps et monopolise l’esprit. La conduite engendre un ensemble de comportements agressifs dont j’ai horreur. Une voiture est un espace privé qui circule dans l’espace public. Pour passer mon permis, il faudrait vraiment que je rencontre un professeur de conduite qui me considère comme un patient sur lequel il voudrait faire un travail expérimental. Je l’appellerais docteur.

En 1996, j’ai réalisé une de mes premières pièces avec une carcasse de voiture sortie d’usine que je voulais comme un ready-made d’une étape en construction. J’ai montré cette carcasse comme un squelette, une ossature industrielle, organique comme un crâne de dinosaure d’un musée d’anatomie. Il y a ensuite cette série de photographies réalisées à Berlin en 2004 sur des voitures garées le long de la Karl Marx Allee au nom éponyme. Cette avenue, large comme deux autoroutes, symbole du pouvoir de l’Allemagne de l’Est, était le lieu de démonstration et de défilés militaires. Toute la partie centrale est depuis devenue un parking. J’ai pris des photos de capots. Dans ces images monochromes, deux extrêmes se liaient. : la matérialité triviale de la voiture et le monochrome dans l’art. Il y a avait en filigrane cette idée d’infini, où se reflètent le soleil et la voute céleste avec cet objet de désir qu’est la voiture, l’objet consommable avec l’espace.

Une autre pièce, sans  titre, également exposée au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, pourrait suggérer l’automobile. Des rondins d’acier posés au sol auxquels j’avais appliqué différentes peintures Arco Iris qui changeaient de couleur lorsqu’on se déplaçait et transformaient ces pièces en une espèce de véhicule ramené à une masse circulaire. Cette pièce évoquait à la fois une clairière dont on aurait élagué des arbres, une sorte de ruine romantique ou un parking.

RT : Les voitures, quand elles ont porté un projet d’avenir, ont parfois été des grandes visions qui ont marqué nos sociétés ?

MM : Je trouve que les voitures des années 50 étaient belles, présentes. Je suis fasciné par le style Stream line américain. Il y avait à cette époque le désir d’imaginer un futur au présent. La DS était fabuleuse parce qu’elle faisait voyager en la regardant. Je trouve également la Twingo et la Porsche sympathiques tout simplement parce ce sont des personnages. Les voitures d’aujourd’hui sont désolantes. Cinquante personnes travaillent sur leur design et le résultat est complément désincarné. Elles sont bien trop ancrées dans des réalités de marketing pour être des concepts pour la société de demain.  Convenir à tout le monde sans convenir à personne, sans réelle vision ni idées directrices.

RT : Qu’est ce qui te fascine dans ce règne de la civilisation automobile ?

MM : C’est ce que le cinéma américain en a fait. Je suis fasciné par Los Angeles mais en même temps je ne pourrais jamais y vivre parce que je ne pourrais pas y circuler. C’est ce rêve d’une ville en pleine campagne avec des héros contemporains comme Drive, héros extrêmement calme dont la seule raison est de conduire qu’importe ce qui se passe. Quand tu circules sur Mulholland Drive, tu comprends cette fascination cinématographique. La plupart des films qui sont tournés à L.A ont comme sujet la ville elle-même.

 

Conversation entre Mathieu Mercier & Romaric Tisserand

Réalisée le 25 février 2013

 Légendes photo

A – ( HELP ) -Photographie sans titre et sans format © Mathieu Mercier

B – 100 cars on Karl-Marx Allee, 2004, Photographie couleur / C-Print, 170 x120 cm

C- Vue de l’exposition ( Pour les rondins ) Vue de l’exposition, Mathieu Mercier, Sans titres 1993-2007, ARC/Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, du 20 octobre 2007 au 6 janvier 2008.

 

PART 2

 

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LA RONDE DE NUIT
(TUNING IS NOT A CRIME )
by Romaric Tisserand
 
L’art sophistiqué de la traque est un art hérité des anciens. Son pendant urbain, la ronde de nuit, est devenue ma façon d’arpenter la ville, d’en définir son territoire et par là même mon propre espace. L’idée de l’errance, de son abandon volontaire aux histoires dérisoires de la cité nocturne, a nourri ce désir presque macabre. C’est le moment précis de la course solaire où apparaissent de l’ombre ces machines modernes célibataires, prothèses exubérantes et trophées automobilistiques qui ont su insuffler l’esprit de Mad Max à la logique industrielle. Cet art de l’augmentation a toujours suscité en moi une intense fascination comme un immense effroi. Cette nécessité absolue d’augmenter le modèle de série, le tuning modeste, celui des assemblages indécelables, du petit spolier, des vitres foncées, pot d’échappement chromés et jantes alliages. C’est celui-là qui me fascine le plus. Sous le protocole de la marche aléatoire et de l’usage compulsif du flash, j’ai traqué, quartier par quartier, rue par rue, ces utopies urbaines, constituant une archive voyeuriste de cette flore mécanique, carnet de chasse symphorophile. L’usage de pellicules ultra-rapide 3200 asa ne laisse que l’idée des formes, dénudées de toute couleur. Un rayon X. Comme un film porno qui aurait été tourné par une machine. Frontal et sans dialogue. Je leur imagine des vies, des exploits et devine leur crash inévitablement prochain dans le crépitement et la tôle froissée. Signe d’un chevalerie dont l’ordre serait resté occulte aux yeux du monde, ces bolides assurés tous dégâts, rappellent que l’orgasme visuel est un acte de bravoure.Tuning is not a crime.
 
Série  2006-2013
Format A4
Impression Monochrome
Tirage limité à 100 exemplaires
 
 

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About Icaarlamarck

Romaric Tisserand is a visual and performance artist. His work is focused on new perspectives and practices in photography and contemporary culture, developing online exhibition like 3360 MoMO from M to O (1120times.com) or AAnonymes, the search of the deliberated accident (2005-2009) and new media supports. He has supported and coordinated a series of non-western and emerging artists, as well established artists: from Lise Sarfati’s in Roma at the Villa Medicis to Samuel Fosso’s monographic show at Rencontres d’Arles. He is creating a plumber shop gallery, MoMO Galerie, since 2010. Since, he is involved in artistic direction and production partnership with the studio and magazine Momologue.