Conversation avec Cyprien Chabert

(English Version below)
Cyprien Chabert reproduit presque à distance des gestes sur les surfaces murales qu’il s’approprie. Chaque walldrawing est l’occasion de répéter la mémoire des formes qu’il acquiert en réalisant des exercices qu’il appelle les « kilomètres d’encre » pour recréer des univers végétaux.

Le végétal est devenu, au gré du développement de son travail, l’esthétique de prédilection pour proposer une nouvelle utopie « décente ». A travers des techniques antiques tels que le fusain et la gravure, Cyprien Chabert nous offre la possibilité d’être envahis par l’espace de formes dont est l’architecte. Cette conversation nous propose d’envisager le travail de l’artiste comme la recherche d’un geste conscient et assimilé.


R_ Nous vivons désormais dans un monde totalement cartographié où il ne reste plus d’endroit inconnu, obligé d’aller chercher un ailleurs acceptable. Tu proposes une nouvelle utopie au travers du végétal. Quel est ton rapport avec cette nature réappropriée ?

C_ Quand je suis arrivé aux Beaux-arts, je faisais essentiellement de la photographie en noir et blanc mais également beaucoup de dessin. J’ai donc essayé de trouver un médium qui fasse lien entre ces deux pratiques. J’ai donc choisi la gravure en eau-forte qui offrait, comme la photographie, des niveaux de gris, les passages dans les acides, et un format proche du dessin.
Spontanément, j’ai commencé à dessiner des plantes. Je souhaitais, au début, réaliser des paysages chargés, à l’ancienne, car je trouvais que cette technique était vraiment appropriée.
Je souhaitais proposer un certain exotisme, un ailleurs. J’aime beaucoup le jardin parce que c’est également une situation qui m’est chère, un entre-deux, celui du métissage. Entre deux cultures, nord-sud, c’est aussi la situation qu’à un jardin, entre la forêt et la ville, entre le sauvage et la culture. Je pense à Le Notre, lorsqu’il réalisait ses jardins, superbement découpés à l’échelle du compas, et en face de ces jardins il y avait les loups, les ours. Il fallait inspirer la force, assujettir la nature, rationaliser ce monde violent.
C’est une sorte de reconquête du sauvage. Alain Roger en parlait très bien : «  nos autoroutes sont des cathédrales, les plus beaux points de vue sur le paysage ». Ces autoroutes sont bien souvent cachées, camouflées par un placebo végétal. Ne considérons pas nos routes et notre progrès comme des cicatrices mais bien comme des rides !
R_ Cependant, l’esthétique est le premier contact qu’offre ton travail ?

C_ Oui, mais dans « l’esthétique », il y a une éthique, une morale, un challenge. Je n’arrive qu’avec un fusain, face à un espace blanc que je remplis entièrement en un temps généralement court.
J’ai vu les exposition de Ellsworth Kelly et Matisse. Pour moi, cela a été un choc superbe. Avant, j’étais comme beaucoup de monde, travaillant avec la même palette, adorant Egon Schiele et Gustav Klimt comme le Gris de paine, le jaune de Naples. Puis, J’ai lu Matisse qui parlait de la mémoire des formes. C’est pour cela que je dessine chez moi. Il faut qu’en amont tu aies travaillé tes formes pour qu’elles viennent avec le geste. C’est pour cela que j’appelle certains de mes dessins « 1 kilomètre d’encre », car il s’agit de marathons, d’une véritable course de fond.
M_ Le souffle, la respiration, le geste sont des éléments fondateurs de ta démarche mais curieux pour ceux qui approchent ton travail par le visuel, l’esthétique. Savoir que derrière il y a un exercice, un mouvement, quelque chose de très physique.

C_ L’essence même du dessin n’est pas de faire des formes mais de former son propre regard, une acuité visuelle qui ne passe que par la rigueur du geste, d’une gymnastique du corps.
Dans le mot « esthétique », il y « éthique », une morale. Pour illustrer ce sentiment, il y a une phrase fétiche que j’adore d’Oscar Wilde lorsqu’il écrit à Whistler Gibbs sur la brume de Londres pour exprimer les différences que l’on peut ressentir par rapport à des paysages : « La brume de Londres c’est un effet de style à saisir pour le gens de culture et un rhume à attraper pour ce qui n’en ont pas ».
Proust à été un des premiers à écrire sur le paysage en mouvement ; le paysage vu d’une calèche, les décalages entre des arbres et une église. Ce n’était pas esthétique à cette époque-là mais c’est l’intention, la morale et l’éthique qui ont fait que cela est devenu héritage culturel.
Je pense que c’est pareil pour l’envie de transpirer sur les murs et l’envie de faire des kilomètres de dessins, des kilomètres de jungle. J’ai envie de réaliser des hectares de jardins.
M_ Par contre, tu réalises tes peintures murales dans des dimensions qui ne sont pas à l’échelle réelle. Comment le geste peut-il alors s’ouvrir sur de telles surfaces? s’agit-il de cette fameuse mémoire des formes.
C_ C’est un tout. J’ai recherché toutes les peintures murales en Asie, à Pompéi, des formes que j’essaie de m’approprier. Je suis allé voir le travail de gens comme Sol LeWitt et Penone. Cela m’a obligé à travailler mes propres formes bien qu’elles soient organiques, florales et à penser sculpture et des jeux d’échelles.
Même si certains dessins muraux montrent une végétation très dense et stylisée, j’arrive de plus en plus au geste, le végétal étant comme un passage à l’abstraction. Au départ, il s’agit seulement de lignes que je réalise en retenant mon souffle. J’ai alors certains dessins que j’appelle des «dessins en apnée» qui sont très semblables au geste final réalisé sur le mur.
R- Le fait que ton travail soit éphémère par l’usage du graphite est-il un processus intégré à ta démarche où bien est-ce une contrainte à gérer ?

C- Le fait que mon travail soit éphémère renforce son rapport à l’éthique, à la morale. C’est finalement le geste qui compte. Ce qui est important finalement dans ce travail, c’est le fait que je réalise avec mes fusains des dessins muraux et le fait que le jardin puisse s’effacer. Je garde ainsi un contrôle et si jamais on ne le touche pas, il restera pour toujours. Les dessins préhistoriques de la grotte de Lascaux ont été fait au fusain. Le charbon de bois reste un support extraordinaire que rien n’altère …excepté un doigt.
M_ Tu connais les attentes du lieu que tu t’appropries ?

C_ Cela dépend du lieu. La pratique que j’ai pu avoir avec Vincent Barré, un ancien architecte qui travaille sur les villes nouvelles, m’a fait prendre conscience qu’au départ, tu ne proposes pas encore, tu poses des questions : savoir qui est-ce qui vit dans ce lieu là, si il s’agit d’un lieu désaffecté, quelle est son histoire.
En fonction de cela, je peux réveiller et donner vie à mes plantes…Pour mon travail, je cherche d’abord un contexte. Je ne sais jamais ce que je vais faire au départ.
R_ Pour revenir à l’idée de la transpiration, du geste, tu te distingues des stratégies actuelles ?

C- Avec le Ready-made, on est arrivé au point où il n’y a plus d’art sans stratégie. Un artiste qui a une envie, même la simple qu’il soit, est obligé pour se faire comprendre, d’utiliser les stratagèmes que lui offre son époque.
R_ C’est rentrer dans le système pour mieux le modifier ? Cela rappelle étrangement la pièce de Jenny Holzer « Use what is dominant to change it quickly » ?
C_ Justement, j’appelle ainsi la technique du centrisme, celle du cheval de Troie. Cette stratégie est directement liée à ma condition de métissage. Au lieu de créer une réaction, je veux me faire comprendre tout de suite par une séduction, je veux plaire à la première lecture, je veux écouter les gens  tout en sachant pertinemment ce que je vais leur proposer.
R_ C’est une recherche du compromis un peu trop facile ?

C- C’est le poids de mon métissage, le refus  de me mettre à l’écart.
R_ La nature n’offre t’elle pas des modèle de stratégie ignorée et que l’homme reprend à son compte par mimétisme ?

C_ Ce qui m’intéresse dans la flore c’est la stratégie qu’elle use pour investir ses lieux. Savoir qu’un pin parasol peut former un toit et une colonne, qu’un cyprès un autre volume.
Les fougères Grand Aigle à Fontainebleau sont des plantes très communes. C’est une plante préhistorique que tu retrouves dans le monde entier et qui a su voyager par cette technique de rigole centrale semblable à une tuyauterie.
A chaque projet, j’essaye de découvrir des plantes pour connaître leur stratégie, si je recherche effectivement de créer un toit, un sol, des colonnes. A travers le jardin, j’ai envie de parler de la notion de sauvage, de comment peut on apprivoiser le sauvage.
Les orchidées sont des fleurs qui n’ont pas leurs racines dans la terre. Elles ont très peu de feuilles et se nourrissent par leurs racines de l’air. Dans la famille des orchidées, il y a également beaucoup de plantes carnivores, car elles ont besoin d’autre chose que la photosynthèse pour survivre. C’est une superbe stratégie.
M_ Je pense aux intérieurs grands malls américains et à leurs villes fermées dans lesquels l’on veut mettre des plantes dans des bacs.

C_ Comme aux Halles, où François Blanc a installé des murs de plantes. Cela aussi c’est une stratégie, de choisir des plantes amazoniennes les plus éloignées de la lumière pour en faire des plantes d’intérieur murales qui se suffiront d’1% de la lumière. C’est tout de même une sacrée stratégie.
R_ lorsque tu crées des espaces visuels, ta nature est-elle toujours pacifique ?

C_ Elle ne se veut pas toujours pacifique. J’ai pu créer des natures animales. Je pense souvent, par exemple, que la fougère ressemble énormément à une pieuvre. La Nature est anthropomorphe. C’est Nietzsche qui en parlait, on ne voit jamais la Nature d’une manière objective, on la voit toujours par rapport à un prisme, à une fenêtre, une vision subjective.
Même dans une nature qui n’a jamais été travaillée, tu pourras découvrir des premiers plans et des seconds plans et ton propre chemin dedans en la regardant. Cela a été ma stratégie pour penser à Cergy Pontoise un jardin panoramique, avec un sol et un toit. J’ai planté des pins d’Ecosse et des fougères selon la configuration d’un quartier parisien
M_ Quel sera ton prochain geste ?

C_ J’évolue jusqu’ici et je trouve toujours des solutions, de nouvelles formes d’expressions. Mon travail passe d’abord par le faire.
M_ Est-ce que tu pourrais abandonner les végétaux ?

C_ Je pense me décrocher du végétal. Mon travail c’est toujours articuler entre le bidimensionnel et le tridimensionnel. C’est également le cas pour mes moquettes de bitumes qui sont d’abord réalisées en dessin et ensuite installées en trois dimensions.
Je travaille dernièrement avec du bois. Je pense que le végétal, à l’instar du paysage, doit m’amener à l’abstraction. Le végétal ne reste qu’un prétexte.
J’ai envie de m’échapper du poids décoratif du floral. Ce qui me plait, ce n’est pas de dessiner ses fleurs, ses fruits et les racines, mais plutôt la manière dont elle se découpe dans l’espace. Ce que je travaille, ce n’est pas leurs images, ce sont les courbes et les contre-courbes. Le végétal offre les plus belles formes, de décrochements, de confusions structurées de l’espace.
Lorsque tu rentres dans une forêt qui n’a jamais été travaillée par l’homme, tu y trouves toi-même ton propre sens. Mes derniers dessins de lignes me rapprochent de l’abstraction. C’est le fait de suivre une ligne, un souffle. Je ne pense pas à l’image finie, c’est le souffle qui est l’acte directeur et le jeu rétinien qui le stoppe.
Romaric Tisserand  &  Margherita Ratti,  janvier 2005
Cyprien Chabert est représenté par la Fat Galerie 

( ENGLISH VERSION )

Cyprien Chabert reproduces great physical gestures following the influence of Matisse ‘gestes’ on reappropriated wall surfaces. His wall drawings, which he calls “Kilometres of ink” are an opportunity to repeat the Memory of forms which he has acquired, in order to recreate vast worlds of vegetation. Throughout the development of his work, plant life has become the chosen aesthetic to present a vision of a “satisfactory” utopia. Employing old-fashioned techniques ofengraving and using charcoal, Cyprien Chabert allows us to be overwhelmed by the shapes he fills space with.

This conversation opens to different and “possible” investigations across new lands and landscapes…

R_ Nowadays, we live in a world that has been mapped and in which there are no longer any unknown places. We are thus obliged to look for an alternative kind of “elsewhere”. You offer a new utopia through plant life. What is your relationship with this reappropriated nature?

C_ When I arrived at the school of Fine Arts, I was mainly doing black and white photography but

also a lot of drawing. So I tried to find a medium which could bring the two together. So I chose

etching, which offered, like photography, scales of grey, acid passages, and a format close to

drawing.

I began, spontaneously, by drawing plants. In the beginning, I wanted to produce ornate

landscapes, in the old-fashioned, traditional way, because I found this technique appropriate.

I wanted to suggest a certain exoticism, an “elsewhere”. I love gardens because they contain a

situation which I am fond of, that of crossbreeding, being between two things. Between two

cultures, north-south, that’s the situation you find in a garden: between the forest and the town,

between the wild and civilisation. I think of Le Notre, when he was creating his gardens, perfectly

arranged according to the compass, and around those gardens there were wolves and bears. It

was a case of subjugating and civilising that natural, violent world.

It’s a sort of reconquest of the wild. Alain Roger expressed it very well: “our motorways are

cathedrals, the most beautiful viewpoints of the landscape”. These motorways are often hidden,

camouflaged by a kind of plant placebo. We should not consider our roads and our progress as

scars but as wrinkles.

R_ However, it’s the aesthetic of your work that first meets the eye, isn’t it?

C_Yes, but the “aesthetic” includes ethics, a moral, a challenge. I arrive with nothing but a piece of

charcoal, before a white space which I fill up, generally in quite a short time.

I saw the exhibition of Ellsworth Kelly and Matisse. It had a great impact on me. Previously, I had

been like many other people, working with the same range of colours, loving Egon Schiele and

Gustav Klimt, paintings like the Gris de paine”, the jaune de Naples”. Then I read Matisse, who

spoke of the Memory of forms. That’s why I call some of my drawings “a kilometre of ink” because

they are marathons, real long-distance efforts.

M_ Breath, breathing and physical gestures are key elements of your approach, but somewhat curious for those who approach your work from the visual, aesthetic point of view. Behind this aspect there is physical exercise.

C_ The essence of drawing is not in making shapes but in shaping one’s own outlook, a visual

sharpness which comes only from the effort of physical gestures, from gymnastic movement.

Within the word “aesthetic”, there is an “ethic”, a moral. To illustrate this idea there is a wonderful

quotation from Oscar Wilde, writing to Whistler Gibbs about the London fog, in order to

demonstrate the differences people feel about their surroundings: “London’s fog is a stylistic effect

to grasp for cultured people, and a cold to be caught by those who have no culture”.

Proust was one of the first to write about moving landscapes; the countryside seen from a vehicle,

the changing gaps between the trees and a church. This was not aesthetic at the time, but it is the

intention, the moral and ethics, which have made it become cultural heritage.

M_ On the other hand, you produce your murals in unreal dimensions. How can the ‘geste’ open up on such surfaces? Is it to do with the Memory of forms?

C_ It certainly is. I studied all the murals in Asia, Pompeii, the shapes which I try to make my own.

I went to see the work of people like Sol LeWitt and Penone. That forced me to work on my own

shapes, even though they are organic-based, and to think about sculpture and playing with

proportions.

Even if some murals display very dense and stylised vegetation, I increasingly come back to the

‘geste’, plants being a kind of pathway into abstraction. At the outset, it’s simply a case of

producing lines while I hold my breath.

R_ Your work is rendered ephemeral by the use of graphite. Is this fact integral to your approach or is it a constraint you have to deal with?

C_ The fact that my work is ephemeral reinforces the connection with ethics, morality. In the end

it’s the ‘geste’ that matters.

The thing that’s magical with this work is the fact that I produce murals with charcoal and that the

garden can reclaim itself. In this way I maintain a certain control and if nobody were to touch it, it

would stay there forever. The prehistoric drawings in the caves of Lascaux were done with

charcoal. It is an extraordinary medium that nothing will change – except for a finger!

M_ Do you know about the places which you reappropriate?

C_ That depends on the place. The work I was able to do with Vincent Barré, a former architect who

works on new towns, made me aware that, you don’t plan anything at the outset, you ask

questions: you find out who lives there, whether it’s a place which has been closed down, what its

history is. In this context my plants can be awakened and brought to life… I look for a context first

with my work. I never know what I’m going to do at the beginning.

R_ To come back to the idea of breathing, the ‘geste’, are you employing any particular strategies at present?

C_ With the Ready-made, art without strategy no longer exists. An artist with something to express,

however simple it may be, is forced to use the strategies of his or her time in order to make him

understood.

R_ Is it a case of entering the system in order to change it? That comment reminds me strangely of Jenny Holzer’s piece “Use what is dominant to change it quickly”.

C_ Quite right, I call it the technique of centrism, the technique of the Trojan horse. This strategy is

directly linked to my being mixed-race. Rather than causing a reaction, I would like to be

understood straight away by appearing seductive, I want to please from the very first reading, I

want to listen to people although I’m well aware of what I’m going to suggest.

R_ Are you looking for a simplistic compromise?

C_ It’s the pressure of being of mixed race, the refusal to marginalize myself.

R_ Does nature offer any unknown strategic models which man imitates?

C_ What interests me about plants is the strategy they employ to occupy spaces. The fact that an

umbrella pine tree can create a roof and a column, that a cypress tree creates another kind of

shape.

The ferns in Fontainebleau are very common plants. They are prehistoric plants found all over the

world which have been able to spread due to their central stalk with its internal piping system.

With each project, I try to find out about plants in order to get to know their strategy, if I’m looking,

for example, to create a roof, a floor or columns. I would like, though the medium of the garden, to

deal with the notion of the wild, and how the wild can be tamed.

Orchids are flowers whose roots are not under the earth. They have very few leaves and they get

nourishment from their roots above the ground. The orchid family also includes a lot of carnivorous

plants, since they need more than photosynthesis to survive. It’s a superb strategy.

M_ I think of the Americans with their big malls and closed towns, and the inside of big shopping centres which give you the urge to fill them with plants.

C_ Like at Les Halles, where François Blanc installed walls of plants. That was strategic as well, to

choose Amazonian plants which grow far away from sunlight, to use them for making walls of

plants which need no more than 1% sunlight.

R_ When you create your visual spaces, are you always of a peaceful disposition?

C_ I am not always peaceful. I have been able to create animal natures. I often think, for example,

that the fern looks very much like an octopus. Nature is anthropomorphic. It was Nietzsche who

said that nature is never seen objectively, always through a prism, a window, a subjective

viewpoint.

Even with land that has never been worked, you can find a foreground and a background and your

own route through by looking at it. That was my strategy for Cergy Pontoise, creating a panoramic

garden with a floor and a roof. I planted Scots pines and ferns arranged like a Parisian district.

M_ What will your next ‘geste’ be?

C_ I am evolving and I always find a way forward, new forms of expression. My work happens

when it’s being done.

M_ Could you ever abandon plants?

C_ I hope to disengage from plant life. My work is always about articulating between two and three

dimensions. This is also the case with my asphalt carpets which are first produced as drawings and

later installed in three dimensions.

I have been working lately with wood. I think that plants, like landscapes, should lead me towards

abstraction. Plants are just a pretext.

I would like to escape from the pressure of floral decoration. What I like is not drawing flowers,

fruits and leaves, but rather the way in which they occupy space. I don’t work on their images, but

on the way they curve and bend. Plants offer the most beautiful shapes, thrusts, and confused

structures within space.

When you go into a forest which has never been exploited by man, you make your own sense of it.

My latest drawings are lines which are leading me towards abstraction. It’s a case of following a

line, a breath. I don’t think about the final picture, it is the breath which controls it and the eye which

brings it to a close.


Romaric Tisserand & Margherita Ratti /

translated by Tim Mc Leish /

January 2005

About Icaarlamarck

Romaric Tisserand is a visual and performance artist. His work is focused on new perspectives and practices in photography and contemporary culture, developing online exhibition like 3360 MoMO from M to O (1120times.com) or AAnonymes, the search of the deliberated accident (2005-2009) and new media supports. He has supported and coordinated a series of non-western and emerging artists, as well established artists: from Lise Sarfati’s in Roma at the Villa Medicis to Samuel Fosso’s monographic show at Rencontres d’Arles. He is creating a plumber shop gallery, MoMO Galerie, since 2010. Since, he is involved in artistic direction and production partnership with the studio and magazine Momologue.